Marie Villena plaide pour le lien entre jeunes retraités et particuliers

Ancienne avocate, Marie Villena, 37 ans, a cofondé Les SuperActifs, une entreprise de l’ESS (Économie Sociale et Solidaire) qui permet à de jeunes retraités de proposer leurs services à des particuliers.

Du métier d’avocat à l’entrepreneuriat

C’est avec un large sourire et des yeux pétillants que Marie nous reçoit. Son épanouissement, elle le doit notamment à son investissement pour Les SuperActifs. Mais Marie n’a pas toujours baigné dans l’entrepreneuriat, loin de là. Collégienne, elle souhaite devenir juge pour enfants. Finalement, au cours de ses études à Lille et Paris, c’est le droit des affaires qui la séduit. Elle réussit l’examen du barreau et une carrière d’avocate s’offre à elle. À Paris tout d’abord, puis à Rennes où elle emménage en 2016 pour suivre son mari qui y effectue son internat de médecine.

Quelques années et 3 enfants plus tard, la motivation professionnelle s’estompe : « je trouvais mon métier prenant et assez stressant : dans cet environnement concurrentiel, il faut être très réactif à n’importe quelle heure et jour, on est amené à prendre rapidement des décisions avec des conséquences importantes ». Puis un événement lui fait réaliser qu’il est temps d’arrêter : « un jour, j’ai dû partir en audience et mon mari était d’astreinte, j’ai mis les clés de la maison dans le sac d’école de mon aîné de 4 ans en disant à la baby-sitter « ne t’inquiète pas, il t’expliquera comment la maison fonctionne ». On a réalisé avec mon mari que ça ne pouvait plus tenir. Ce n’était pas ma conception, en ayant des enfants, de ne pas m’en occuper et d’avoir le sentiment de faire un peu n’importe quoi. »

Alors en contact avec des entrepreneurs, Marie trouve fascinante la possibilité de fonder son entreprise, de créer pour soi et de donner à son projet le sens souhaité : pourquoi, donc, ne pas entreprendre ?! Pour autant, c’est l’inconnu. Personne dans son entourage qui ne soit entrepreneur, son père est agriculteur. Mais le désir est plus fort chez cette active : « j’avais envie de redonner un côté social à ce que je faisais, animée par un sentiment de « faire pour les autres et pour moi » comme je l’entendais et pas tel que l’on me le dictait ».

Tandis que la réflexion entrepreneuriale s’oriente vers le social, Marie rencontre Joséphine de Geyer lors d’un dîner. Ensemble, elles échangent sur leurs aspirations, « à cette période de vie où, en tant que femme et mère, on remet pas mal en question nos carrières professionnelles. »

Très vite, le duo se constitue autour d’un projet initial : mettre en relation les personnes âgées et les étudiants. Les deux rennaises intègrent donc un incubateur dans cet objectif, mais s’aperçoivent finalement que ces besoins intergénérationnels sont déjà couverts par des plateformes ou des colocations. En revanche, à la lecture de thèses, elles réalisent que les jeunes retraités, eux, font bien face à des difficultés… non traitées. « Le passage à la retraite est un vrai sujet, et ils peuvent ou veulent encore donner un coup de main à tout le monde ! »

Répondre aux problématiques des jeunes retraités et des particuliers à travers le lien social

Ainsi parties pour s’ouvrir à la silver économie, Marie et Joséphine fondent Les SuperActifs, une plateforme de mise en relation des jeunes retraités avec des particuliers pour du service à domicile (entretien de jardin ou de la maison, garde d’enfants, soutien scolaire, etc.).

« Nous souhaitons répondre aux grandes problématiques du passage à la retraite : la perte de revenus, l’isolement et le sentiment d’inutilité » explique Marie. « En plus de la rémunération financière pour le service rendu, nous incitons les particuliers à offrir une « contribution bienveillante » aux SuperActifs, comme par exemple un repas occasionnel,un café, ou une sortie en famille. Notre volonté est de créer une vraie communauté basée sur le service intergénérationnel et le lien social. »

Et ça marche : les particuliers font volontiers appel aux retraités, apprécient le côté humain du service rendu et cet échange de bons procédés. Les retraités, eux, se disent heureux de « se sentir utile » et de donner du sens. « Une dame m’a même dit que cela lui redonnait foi en l’avenir : elle avait trouvé valorisant que les jeunes générations se préoccupent des retraités », confirme la cofondatrice des SuperActifs.

Marie et Joséphine sont actuellement accompagnées par les Premières Bretagne, un incubateur dédié à l’entrepreneuriat féminin en Bretagne. Les prochaines semaines s’annoncent décisives pour confirmer leur business model : une nouvelle version de la plateforme, forte de 1600 utilisateurs actuels, est en cours de développement. Des collaborations avec des collectivités se développent, bientôt peut-être en Bretagne comme elles l’espèrent ? La trajectoire est bien amorcée pour ces Bretilliennes, sélectionnées pour participer au programme Femmes Entrepreneuses d’Orange.

Un équilibre personnel au service de l’épanouissement collectif

Désormais maman de 4 enfants, Marie apprécie l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ainsi créé. « Je m’épanouis vraiment ! Je ne dis pas qu’il y a moins de travail qu’avant, mais je suis libre de mon organisation et de mes choix. Avec Joséphine, nous avançons au rythme que nous voulons donner au projet. Notre garde-fou, c’est qu’il ne se fera jamais au détriment de nos enfants. »

Son moteur ? Apprendre ! « Je n’aurais pas plus appris dans une formation pendant 2 ans qu’à travers ce projet… J’ai souvent pensé que je ne savais rien faire d’autre que du droit des affaires, et finalement, découvrir que je suis capable de faire plein d’autres choses et de sortir de sa zone de confort, c’est vraiment exaltant ! », s’enthousiasme-t-elle.

L’écosystème entrepreneurial breton et le secteur des seniors lui offrent de formidables occasions de rencontres « hyper sympathiques et bienveillantes. » Lorsqu’on l’interroge sur ses valeurs, elle cite spontanément la famille, le respect, et le sens des autres : tournée au service des SuperActifs, cette âme cachée d’entrepreneure a trouvé son bonheur… et fait celui d’autrui.

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